Le Québec n’a actuellement pas de plan pour faire face au vieillissement de la population et aux besoins que cela engendre. Plusieurs voix s’élèvent pour demander des investissements massifs en soins de prévention et en maintien à domicile.
Si rien n’est fait pour renverser la tendance, le coût des soins de santé liés à l’autonomie et au vieillissement de la population va exploser d’ici 2040. Selon une étude du HEC Montréal*, la population demandant des soins va augmenter de 69%. Pour maintenir le niveau de service actuel, 42 500 places de CHSLD ou de MDA devraient être construites (soit doubler la capacité du réseau existant), les coûts financiers des programmes passeraient de 7.6 milliards à 16.5 milliards de dollars et le besoin en employés des institutions augmenteraient de 13 700 infirmières et de 45 600 travailleur·ses en soins d’assistance. Sans changement de cap, un maigre 11% de la couverture des besoins en soins à domicile serait maintenue**. Or, le constat est que le modèle actuel est déjà déficitaire et répond peu, mal ou pas vraiment aux besoins de la population aînée.
L’AQDR s’est positionnée*** dans la foulée de cette étude : nous demandons que le gouvernement écoute les groupes communautaires, les tables des aînées et les acteur·trices du milieu. Nous voulons des investissements importants pour favoriser le maintien des personnes aînées dans leurs milieux de vie.
« Collectivement, nous avons tellement attendu avant d’agir que la pente est maintenant très raide. Si on ne s’y attaque pas immédiatement, on vivra bientôt une triple crise : une crise du revenu des aînés, une crise du logement et une crise de soins à domicile. Une tempête parfaite ». Pierre Lynch, Président de l’AQDR
À terme, cet engagement dans les soins de prévention permettrait de réduire la pression financière sur les finances publiques tout en répondant mieux aux besoins de la population. Nous devons éviter à tout prix que le fardeau du vieillissement démographique empêche les personnes aînées de vieillir dans la dignité tout en faisant retomber l’ensemble de la charge sur les proches aidantes à cause du désengagement de l’État.
Des solutions existent. Notamment, l’IRIS**** propose une série de mesures de décentralisation et de réorientation du système de soins au Québec. Outre la régionalisation des soins, il faudrait viser une balance équilibrée entre les investissements en prévention et en curatif. En ce moment, la Santé publique accapare un maigre 1.5% du budget de la santé au Québec. Si l’on y ajoute les services de première ligne (CLSC, soins à domicile, santé mentale, etc.), cela monte à 27% des dépenses.
« Autrement dit, une part disproportionnée des dépenses est consacrée à soigner à grands frais les gens lorsqu’ils sont déjà très malades ou en crise, mais très peu est fait par le système de santé pour éviter que ces personnes ne tombent malades en premier lieu ». Anne Plourde, Myriam Lavoie-Moore et Guillaume Hébert, IRIS
Si on ajoute à cela un refinancement à court terme des secteurs clés de la prévention, comme la santé mentale, la santé publique, les services à domicile et le secteur communautaire, il serait possible de réduire la pression à venir sur les institutions et d’accorder les priorités du gouvernement sur celles de la population. Nous préférons rester dignes et enracinés·es dans nos milieux de vie plutôt que d’être pris·es en charge dans le système curatif.
Prenons action dès maintenant pour réclamer une réorientation des priorités publiques.
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* Horizon 2040, projection des impacts du soutien à l’autonomie au Québec, Chaire de recherche Jacques-Parizeau des Hautes Études Commerciales, dirigée par MICHAUD, Pierre-Carl, novembre 2023
** Vieillir à la maison sera de plus en plus difficile au Québec, Radio-Canada, Érika Bisaillon, 15 novembre 2023
*** L’AQDR réclame des actions structurantes fortes pour améliorer les services de soins à domicile (SAD), Communiqué de presse de l’AQDR nationale, Montréal, le mercredi 15 novembre 2023
**** Six remèdes pour révolutionner le système de santé au Québec, Institut de recherche et d’informations socioéconomiques, PLOURDE, Anne, LAVOIE-MOORE, Myriam et HÉBERT, Guillaume, IRIS, 13 novembre 2023.